Critique : Proposition sur la BCE

Publié le par Média critique

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Contrairement à d’habitude, je ne me pencherai pas sur le détail précis de la proposition et je ne m’efforcerai ni de le clarifier ni de le simplifier : le document en soit est très clair, très documenté, fait 11 pages et je vous invite à le lire avant mon article pour une meilleure compréhension.

 

COMPROMETTRE OU SE COMPROMETTRE

 

Au cours de sa dernière séance, le 21 mars 2012, le Conseil de l’UE a adopté une proposition de la Grèce et du Portugal qui ne pouvait qu’être novatrice dans les domaines monétaires et financiers mais il s’agissait d’une solution de compromis.

Dans l’Union Européenne, les compromis servent trop souvent à éviter de se compromettre.

Avec cette proposition concernant la BCE, il appartenait à l’Allemagne, à la France et à l’Irlande de prouver qu’ils savaient se mouiller. Alors ? Essai transformé ?

 

v  Plus de transparence, plus de démocratie

Et bien, nous devons reconnaitre une chose aux représentants allemands, français et irlandais : ils se sont souvenus pour la première fois depuis longtemps que l’Union Européenne, pour exister, doit être viable à l’extérieur et fiable à l’intérieur.

C’est rare que des technocrates de notre belle Union s’en rappellent mais les populations existent, on leur doit même ce doux qualificatif de « démocratique ». Si la proposition est adoptée, elle aura l’avantage de réintroduire la démocratie dans les rouages financiers de l’UE et même peut-être de ressusciter la démocratie au sein des Etats-membres.

Pourquoi cet optimisme ?

Peu de nouveaux organes sont créés, la plupart, comme Eurostat, existent déjà et doivent juste être adaptés à leur nouveau rôle. C’est un gage que prennent ces pays contre l’inflation institutionnelle, avec l’immobilisme et les inconvénients qu’elle entrainerait. C’est également un regain de publicité pour des institutions méconnues ou malaimées.

Au sein des organes nouveaux créés, comme l’éventuelle Commission de Convergence et de Croissance (CCC), ce sont des parlementaires des 27 Etats-membres que ces trois pays proposent de faire siéger.

Peut-être cela ré-investira-t-il les populations dans leur vie législative.

En effet, en ce moment, en Europe, les taux d’abstention crèvent de nouveaux plafonds. C’en est à un tel point qu’en France, berceau de toutes les révolutions, des spots publicitaires encouragent les électeurs à aller voter aux prochaines élections présidentielles !

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La France, championne de la démocratie ?

 

v  Trop de sanctions

                Néanmoins, nous déplorons que cette excellente synthèse du système européen en matière monétaire soit restée trop « berlinocentrée ».

« Allemagne » pour les Européens, va bientôt être synonyme de « sanction ».

Oh, ils instaurent une sanction qui se veut gentille ! Puisque, comme le dit noir sur blanc la proposition d’amendement, « des mesures existent déjà au sein de la Zone Euro », on ne touche pas aux sous (ou à ce qui reste de sous) des Etats à sanctionner, on se contente de limiter leur accès aux eurobills.

Je vous invite à vous rapporter au tableau fourni par les Etats auteurs de la proposition : il y a un rapport de 2 à 15 entre les taux d’intérêt auxquels a accès l’Allemagne et ceux de la Grèce. Imaginez ce même taux d’intérêt si l’emprunt national (par opposition à européen) devient une sanction.

Ne nous leurrons pas, la sanction proposée est bel et bien pécuniaire, et sous sa forme la plus perverse.

Néanmoins, les Etats que ces sanctions menacent en premier lieu risquent d’accepter cette proposition pour que le dispositif d’emprunt souhaité soit enfin doté des rouages précis qui lui permettront d’être effectif. C’est ce qu’on appelle un Etat aux abois. Reste à savoir s’il prend de bonnes décisions dans cet état.

 

v  Une solution…enfin !

                Il nous semble que l’Allemagne, la France et l’Irlande formulent ici la première solution viable économiquement et acceptable pour tous à ce qu’on pourrait appelle « le dilemme de l’Euro ».

Il y a un mot qu’on lit peu dans leur proposition, c’est « solidarité ». Pourtant, c’en est bien l’idée directrice. L’Allemagne et la France en particulier font un sacrifice en acceptant la mutualisation de la dette mais ils le font conscients de tout ce que des Etats actuellement dans l’impasse auront un jour à leur offrir.

Leur proposition peut paraitre sévère mais en réalité, il s’agit pour eux d’assainir les finances publiques de leurs partenaires, de les guider vers la réhabilitation, vers la croissance et la prospérité. Ils agissent pour leur bien car le bien de Grèce, le bien du Portugal, le bien de l’Italie, c’est aussi le bien de l’Union.

Nous soutenons donc la proposition mais nous attendons avec impatience l’éventuel amendement qui fournirait une alternative à ce mode de sanction. Une solution donc nous entendons souvent parler pourrait être de rendre un visa européen nécessaire au vote de chaque loi de finances nationale.

Le problème de la légitimité de ce visa et de l’éventuelle atteinte à la souveraineté ne se posera pas si les Etats-membres poursuivent, comme l’Allemagne, la France et l’Irlande, leurs efforts en vue d’une Union démocratique, transparente et solidaire.

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Le rêve européen n’est pas encore mort

Amélie Deleuze

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